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Les secrets de fabrication de la mémoire commune !

Cette semaine j'ai visité pour vous l'exposition « Paris libéré, Paris photographié, Paris exposé » au Musée Carnavalet. 

A l'occasion du 70ème anniversaire de la libération de Paris, le musée présente l'exposition « Paris libéré, Paris photographié, Paris exposé », un titre en référence bien entendu au fameux discours du Général de Gaulle prononcé le 25 août 1944 à l'Hôtel de ville de Paris. 

Un discours dont je ne peux m'empêcher de citer les premières phrases, moins médiatisées mais totalement bouleversantes à mon avis ; des phrases qui traduisent l'émotion, la fierté mais aussi, et c'est ce qui est puissant, la conscience du dépassement de l'individuel par la marche sacré de l'histoire collective : « Nous sommes ici chez nous dans Paris levé, debout pour se libérer et qui a su le faire de ses mains.
 Non, nous ne dissimulerons pas cette émotion profonde et sacrée. Il y a là des minutes, nous le sentons tous, qui dépassent chacune de nos pauvres vies.» 

Quelque jours après ce discours, le musée Carnavalet commence à écrire l'histoire. En effet, deux mois et demi après la libération de Paris du 25 août 1944, alors que la France et les alliés sont encore en combat, le musée Carnavalet ouvre le 11 novembre 1944, date symbolique également puisque jour de l'armistice de la 1ère guerre mondiale, le musée carnavalet donc ouvre une exposition consacrée à la libération de Paris. 

François Boucher, conservateur du Musée et avant tout résistant, lance un appel pour collecter et exposer des documents retraçant tout le processus de libération de la Capitale. On retrouve notamment de nombreux tirages photographiques réalisées par des anonymes ou des photographes de renoms tels Robert Doisneau ou René Zuber. 

Cette exposition connue un succès populaire incroyable ! Elle surfait malheureusement plus sur l'émotion que sur la véracité historique. Le Musée Carnavalet présentait donc sa propre version de l'histoire de la libération de Paris. 

Et c'est ce thème, la subjectivité dans l'évocation historique, dont le Musée Carnavalet s'empare aujourd'hui, 70 ans plus tard, en représentant la même exposition qu'à l'époque mais enrichit de témoignages scientifiques permettant de comprendre comment la fabrique de la mémoire collective est influencée par le traitement visuel des institutions académiques ou culturelles. 

J'ai été fasciné par le concept de cette exposition car c'est une auto-critique osée et géniale de la part d'un musée municipal d'admettre avoir profité de l'effervescence collective pour maquiller la réalité de la complexité des processus en jeu et de carrément présenter au public les mécanismes qui ont été utilisé pour influencer leur perception des événements. 

Une exposition remarquable donc qui doit particulièrement éveiller nos consciences de parisiens du 21ème siècle, ère de la communication et du travestissement marketing. En atteste cette publicité magnifique pour Mcdonalds qui tourne en boucle partout dans Paris : on y voit un cookie bien moulé et attractif, accoudé à une boisson gazeuse légère et rafraîchissante et tout ça pour 2,50€ ! Derrière ce visuel ce cache malheureusement la disparition du savoir faire culinaire, une précarisation asservissante de l'emploi et la victoire de la méritocratie débilitante. La course à l'efficacité court termiste, flattant nos égo, masque malheureusement la victoire du fatalisme sur l'exigence. Dommage.








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