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Joardens, la gloire d'Anvers - LE PETIT PALAIS ☆☆☆☆☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente la première rétrospective française consacrée à l'artiste flamand du 17ème siècle, Jacques Jordaens (1593 – 1678). Cent-vingt œuvres (surtout des peintures et quelques esquisses et gravures), en provenance de musées du monde entier et rassemblées pour l'occasion, permettent de découvrir de manière exhaustive toute la démarche créative de Jordaens et l'ensemble des thématiques abordées dans son œuvre (portraits de famille, grandes compositions religieuses, scènes de banquet et de mythologie...).

MON AVIS : Excellent ! Avant tout, les toiles sont excessivement belles et dégagent une puissante émotion. Mais ce qui permet de jouir aussi vivement de ces compositions, c'est l'exceptionnelle scénographie que livre le Petit Palais. Nous sommes introduis directement dans un espace reconstitué. En effet, un décor grandeur nature et un fond musical (de la harpe me semble-t-il) recomposent l'atmosphère de l'époque. Puis une vidéo introductive, accompagnée de grands tableaux de présentation, permettent aux visiteurs de s'imprégner du contexte politique et économique de l'époque de Jordaens. Ces explications, très pédagogiques mais pas débilisantes, évoquent notamment la ville d'Anvers (dans laquelle Jordaens avait installé son atelier) ou encore la relation de l'artiste avec les deux autres maîtres flamands de la période, figures marquantes de l'histoire de l'art, Rubens (1577 – 1640) et Van Dyck (1599 – 1641).

L'exposition met particulièrement bien en avant le rôle du peintre à cette période de l'histoire. L'artiste, Jordaens comme d'autres, est avant tout un vrai artisan et un chef d'entreprise ! En effet, il possède un atelier, qui emploie des apprentis et une équipe de travail, et il doit recruter des clients pour acheter ses œuvres. Il doit donc positionner son travail sur un avantage concurrentiel et adapter son offre à la demande. Ainsi, nous dit l'exposition, comme les concurrents de Jordaens étaient plus côtés que lui dans le portrait, on retrouve peu cette thématique dans son travail. Au contraire, malgré ses positions idéologiques controversés vis à vis de l'Eglise catholique, le coup de pinceau étincelant de l'artiste pour représenter des scènes bibliques suffira à l'institution, en pleine contre-réforme, pour lui commander de nombreux tableaux religieux. Finalement, l'artiste est donc un vrai commercial et un gestionnaire. D'ailleurs, le succès des œuvres de Jordaens, sur son territoire et à travers toute l'Europe, lui valurent d'être un des personnages les plus riches de la ville d'Anvers au 17ème siècle. De plus, le texte nous rappelle que pour réussir avec son propre atelier, le talent ne suffit pas. L'argent, les relations et même les liens de parenté sont bien souvent indispensables. Jordaens, fils de bonne famille, ne dérogera pas à la règle.

La scénographie propose aussi, à coté de chaque tableau, des commentaires qui permettent d'éclaircir la composition en nous révélant factuellement l'histoire des scènes qui s'y déroulent et l'identité des personnages qui les composent. Ces textes n'essaient pas de nous forcer à considérer l’œuvre comme un chef-d’œuvre. Ils nous donnent juste en toute humilité les clefs techniques pour la comprendre. Libre à nous d'en jouir ! Je note aussi, pour conclure, la présence en fin d'exposition d'une grande installation. Celle-ci, montée par le musée et je vous laisse la surprise de découvrir, permet d'aborder différemment, à travers ses cinq sens, l’œuvre de Jordaens. Mention particulière pour le tableau « La pêche miraculeuse » (Cf. ci-dessous) où l'on voit Simon, qui deviendra le futur apôtre Pierre, pécher miraculeusement après l'intervention divine de Jésus Christ.

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 19 janvier 2014 / Petit Palais – Avenue Wilson Churchill 75008 Paris / Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h et nocturne le jeudi jusqu’à 20h / Tarif plein : 11 euros, demi-tarif : 5,5 euros
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Masculin / Masculin - MUSÉE D'ORSAY ☆☆☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente l'évolution de la représentation artistique du corps nu de l'homme, de 1800 à nos jours, à travers la peinture, la sculpture et la photographie. Le parcours s'articule autour de thématiques qui ambitionnent de refléter toutes les facettes, dimensions et significations de la représentation de la nudité masculine au cours de l'histoire de l'art (l'homme héros, l'homme sportif, l'homme mythologique, l'homme amoureux, l'homme en souffrance...). L'exposition Masculin / Masculin se veut la première grande rétrospective sur cette problématique (après celle organisée il y a tout juste un an par un musée Autrichien). 

MON AVIS : Indécis. C'est, d'un point de vue esthétique, un vrai régal. De superbes œuvres, de toutes les époques et courants de l'histoire de l'art de ces trois cent dernières années, s'enchaînent brillamment pour le plus grand plaisir des émotions. La liste des œuvres qui ont retenu mon attention serait trop longue à dérouler : «Prométhée» de Gustave Moreau, «Dead father» de Ron Mueck, «Fléau» de Henri Camille Danger (Cf. galerie).... Pour ne pas m'étendre, je ne retiendrai d'abord qu'un travail : les photographies kitchs, provocantes et malignes du couple d'artistes français Pierre & Gilles. Celles-ci représentent des corps nus d'hommes, sublimés dans un univers idyllique aux couleurs étincelantes (Cf. visuel de gauche de l'affiche de l'exposition). Je ne m’arrêterai ensuite que sur une seule œuvre : «L'art de la guerre» de l'artiste plasticienne française contemporaine Orlan (Cf. image ci-dessous). Cette toile parodie, de manière brute et frappante, le célèbre tableau de Gustave Courbet, «L'origine du monde», pour mettre en comparaison, me semble-t-il, avec ironie et provocation, le rôle primaire et destructeur du mâle dans l'histoire de l'humanité face au statut enchanteur de procréatrice, et donc de reconstructrice, de la femme.

Toutefois, je n'ai pas trouvé dans cette exposition de fil conducteur suffisamment abouti. La thématique de base est géniale et captivante mais, malheureusement, je trouve qu'elle n'est pas à la hauteur de ses ambitions d'un point de vue éditorial. Les œuvres, bien que formidables, ne me semblent pas répondre exhaustivement à la problématique de départ. On n'arrive pas vraiment à identifier toutes les dimensions que soulèvent la nudité de l'homme dans l'art. Par exemple, la problématique de la représentation du sexe de l'homme dans l'histoire de la peinture ne me semble pas suffisamment abordée et détaillée. Pourtant, elle m'apparaît comme l'élément fondamental de la nudité masculine. Qu'est-ce qui explique que le sexe masculin, très longtemps caché dans les œuvres d'art, se soit peu à peu révélé puis exhibé à l’œil du spectateur ? Pas vraiment de réponse à se mettre sous la dent. Les cartels de présentation sont assez évasifs et généraux. Je déplore ainsi la pudeur excessive du résultat. Pour une exposition sur la nudité, c'est dommage....

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 2 janvier 2014 / Musée d'Orsay – 1, rue de la légion d'honneur, 75007 Paris / Ouvert du mardi au dimanche de 9h30 à 18h avec une nocturne jusqu'à 21h15 le jeudi / Tarif plein : 12 euros, entrée libre pour les moins de 25 ans

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La mécanique des dessous - LES ARTS DECORATIFS ☆☆☆☆

PRÉSENTATION : L’exposition présente, comme le résume très bien le musée des Arts Décoratifs, « les artifices utilisés par les femmes et les hommes, du XIVème siècle à nos jours, pour dessiner leur silhouette ». Concrètement, sont exposés les dessous de mode qui ont façonné le corps de l’Homme (avec un grand H) selon les tendances esthétiques qui ont traversé les sept derniers siècles. Vous trouverez, entre autres, des fraises (col de lingerie pour mettre en valeur le visage), des pourpoints (rembourrage pour rehausser le bombage du torse), des corps à baleine (bâton en bois dans le dos pour raidir le corps), des paniers (corbeille autour de la taille pour agrandir son envergure), des corsets (sous-vêtement rigide pour affiner la taille et remonter la poitrine), des crinolines (sous-vêtement pour soutenir le volume de la jupe) ou encore, ma pièce préférée (Cf. photo ci-dessous), des braguettes (rembourrage placé au niveau de la braguette du bas de pantalon pour reproduire la proéminence du pénis).

MON AVIS : Superbe ! Voici une visite très agréable et intéressante. Le slogan de l'exposition « une histoire indiscrète de la silhouette » est alléchant. En réalité, le traitement n'est pas du tout coquin (oui, oui, je m'étais imaginé un peu d'érotisme !) : l'exposition est en fait très sobre et pédagogique. Les œuvres sont exposées, sous vitrine, dans un espace tamisé et raffiné. Beaucoup de délicatesse et de subtilité dans la présentation générale. J'apprécie aussi les « bonus » de l'exposition. Vous pouvez essayer certains dessous dans un espace interactif ainsi que visionner des extraits de grands classiques du cinéma où les actrices et acteurs dévoilent les dessous de leur dessous (Autant en emporte le vent, Les liaisons dangereuses...).

Cette exposition devient même passionnante quand on arrive à sa conclusion. Celle-ci, rédigée dans un petit encadré en bout de parcours, démontre pour moi tout l'intérêt de cette visite. En voici l'extrait qui a retenu mon attention : « Le corps est taillé par la mode. Il est donc le reflet de la société qui a présidé à sa création. Il n'y a pas de corps naturel, mais un corps culturel » (et dix mannequins nus sont disposés à la sortie de l'exposition pour illustrer l'évolution de la forme de notre corps par rapport à l'évolution de la mode des dessous). Je suis un grand défenseur de l'idée selon laquelle, même inconsciemment, tous nos actes, ainsi que notre perception du bien et du mal, sont façonnés par notre histoire et notre société. L'exposition va plus loin en montrant que même l'apparence de notre corps nu n'a rien de naturelle. La société (et les modes qu'elle génère et qui imprègnent l'opinion publique), encadre notre esprit et même notre corps. Comment alors se prétendre réalistement libre ? La liberté n'est-elle qu'une sensation et non une réalité ?

Mention particulière pour cette information surprenante qui n'a pas manqué de capter mon attention : à l'époque du Directoire et de l'Empire, les hommes élégants et soignés portaient des faux-mollets pour accroître leur sex-appeal. En effet, la virilité était jugée à la circonférence des mollets. Chers lecteurs, vous aurez donc appris dans cette chronique que mes proéminents mollets, tout en muscles saillants, auraient fait de moi un véritable dandy au XIXème siècle !

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 24 novembre 2013 / Les Arts Décoratifs - 107, rue de Rivoli, 75001 Paris / Ouvert du mardi au dimanche de 11h à 18h avec une nocturne jusqu'à 21h le jeudi / Tarif plein : 9,5 euros, Entrée libre pour les moins de 26 ans
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Camille Claudel - MUSÉE RODIN ☆

PRÉSENTATION : A l'occasion du 70ème anniversaire de la mort de Camille Claudel (1864-1943), l'exposition rend hommage à la sculptrice française. Le musée Rodin présente une vingtaine d'œuvres de l'artiste qui a vécu une relation passionnelle et tumultueuse avec Auguste Rodin (1840-1917). Ces œuvres sont issues de la propre collection permanente du musée. Elles ont été données par le frère de Camille Claudel, le poète et écrivain Paul Claudel, ou achetées directement par l'institution.

MON AVIS : Déception.... J'attendais beaucoup de cette exposition. Séduit par quelques sculptures de Camille Claudel, découvertes dans ce même musée Rodin lors d'une précédente visite, j'avais donc, dans un premier temps, hâte d'explorer plus amplement le travail de l'artiste et de contempler les créations qui en découlaient (notamment pour les mettre en parallèle avec le style et l'univers d'Auguste Rodin, de 24 ans son aîné et considéré comme ayant profondément marqué la vie personnelle de la sculptrice). Camille Claudel fût internée en hôpital psychiatrique en 1913 ; je souhaitais donc, dans un deuxième temps, savoir si la démence avait pu influencer ses œuvres et en quoi. Malheureusement, aucune réponse exhaustive à ces questions dans cette exposition. En effet, le musée, en regroupant simplement les œuvres qu'il possédait déjà de l'artiste, n'a pas ajouté de contenu rédactionnel supplémentaire. Les sculptures ne sont identifiées que par un petit encart à l'entrée du musée dont le contenu est très court. De plus, on n'a pas l'impression qu'un espace muséal ait été érigé spécialement pour se consacrer aux sculptures. Celles-ci sont entreposées au milieu d’œuvres d'autres artistes (qui n'ont pas de liens thématiques particuliers avec le travail de Claudel) ce qui réduit l'effet de mise en avant du travail de la sculptrice et déstabilise le spectateur.

Une visite au musée Rodin est toujours un pur plaisir (à découvrir sans hésitation!). L'hôtel Biron, hôtel particulier du 7ème arrondissement possédant le plus grand espace vert privé de la ville de Paris et qui domicilia l'atelier parisien d'Auguste Rodin pendant une certaine période, est plein de charme. Néanmoins, on a l'impression qu'à travers cette exposition, l'opération « Les 70 ans de la mort de Camille Claudel », le musée souhaite plus marquer symboliquement le coup que réellement innover. C'est un événement de communication qui a du sens mais qui est artistiquement, à mon sens, sans valeur ajoutée par rapport à la collection permanente. C'est d’ailleurs pour cela que le musée, me semble-t-il, à très peu communiqué sur l'exposition. A noter que des événements additionnels auront lieu autour de l'exposition (toutes les informations sur le site internet du musée).

Mention particulière pour la sculpture en marbre-onyx et bronze «La vague» (Ci-à coté) où l'on voit une vague gigantesque sur le point de s'écrouler sur trois jeunes filles dansantes et rieuses main dans la main. La tension est à son comble. C'est le calme avant la tempête. Comme si l'artiste, en réalisant un arrêt sur image dans un moment si paradoxal et inquiétant, voulait nous montrer qu'à tout moment des imprévus pouvaient nous sauter dessus. L'issue de la sculpture semble inévitable. Ceci insinuerait que, telle une fatalité, il faudrait accepter les vicissitudes du quotidien. Par contre, la joie et l'entraide constantes, symbolisées par les trois personnages et leur innocence, montrent bien qu'il ne faut pas se résigner et arrêter de s'amuser et partager ensemble jusqu'au bout.

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 5 janvier 2014 / Musée Rodin - 79, rue de Varenne, 75007 Paris / Ouvert tous les jours sauf le lundi de 10h à 17h45 avec nocturne jusqu'à 20h45 le mercredi soir / Tarif plein : 6 euros, Tarif jeune : gratuit.
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Loris Gréaud - PYRAMIDE DU LOUVRE ☆☆☆☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente une sculpture monumentale de l'artiste plasticien français Loris Gréaud (né en 1979). L’œuvre, commandée par le Louvre en partenariat/mécénat avec Mercedes-Benz, est positionnée à l'entrée du musée, sous la grande Pyramide de verre et de métal conçue en 1989 par l'architecte sino-américain Ieoh Ming Pei. Cette œuvre possède une particularité hors norme : elle représente une grande statue..... recouverte d'un drap ! Trois grosses cordes ligaturent fermement ce tissu à la statue, ci-dessous cachée. Ainsi, on devine les formes de la création mais on ne peut pas en voir l'apparence ! Seul un socle massif apparaît au pied de la sculpture, à l'orée du drap. La forme de ce socle, épaisse et lourde, laisse supposer une statue colossale et imposante. Mais le spectateur n'en saura pas plus !

MON AVIS : A travers cette œuvre fantomatique et mystérieuse, Loris Gréaud lance « une réflexion sur l'imaginaire de la statuaire, son inauguration, son dévoilement » explique le musée du Louvre. J'y vois aussi une manière audacieuse et provocante de repenser la vocation de la sculpture. En effet, après l'esthétique de la représentation, on découvre l'esthétique de la supposition et du fantasme : le beau ne se voit plus, il se devine. On laisse supposer une œuvre sublime et impressionnante, un véritable chef-d'oeuvre, mais on ne dévoile rien. 

A l'opposé, je vois également dans cette sculpture monumentale une métaphore sur l'apparence des choses. Dans la société humaine, où paraître semble plus important qu'être, se couvrir d'un drap, c'est cacher aux autres sa vraie nature sous une structure imposante mais vide. Dans tous les cas, voici un travail osé et, me semble-t-il, très intelligent, qui ne manquera pas de lancer de grands débats si vous visitez l'expo en groupe ! 

INFOS PRATIQUES : Jusqu'à janvier 2014 / Pyramide du Louvre – 75001 Paris / Ouvert tous les jours de 9h à 18h sauf le mardi avec nocturnes jusqu'à 21h45 les mercredis et vendredis / Entrée gratuite
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Sens dessus dessous - INSTITUT SUEDOIS ☆☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente une sélection de dessins de l'auteur-illustratrice suédoise de bandes-dessinées Eva Lindström (née en 1952). Spécialisée dans le livre pour enfant, elle est considérée comme une figure importante du genre pour l'avoir esthétiquement renouvelé. En effet, ses dessins, bercés par la nature et le fantastique, se veulent simplistes (au contraire des allures plus strictes et détaillées des représentations classiques pour enfant). L'exposition présente aussi des dessins de jeunes artistes suédoises dont le travail a été marqué par le trait de Lindström. Les œuvres sont présentées dans deux grandes pièces de l'Hôtel de Marle, magnifique hôtel particulier au cœur du Marais, qui accueille l'institut suédois depuis 1965.

MON AVIS : Mitigé. Je trouve originale l'idée de proposer un zoom sur des petites cases de BD pour en faire de véritables œuvres à part entière. De plus, je trouve intéressante la mise en scène comparative permettant de confronter l’œuvre d'Eva Lindström avec celles de ses disciples. J'ai ensuite apprécié le fait de laisser en libre service une pile de bandes-dessinées de chaque artiste pour s'imprégner du récit des histoires brisées par le découpage des images et leur dispersion individuelle. Enfin, je me suis amusé à découvrir dans le dessin de ces artistes, et particulièrement celui de Lindström, des ressemblances avec les traits de Tom-Tom et Nana, dessinés par Bernadette Després.

Toutefois, je trouve que le nombre d’œuvres trop limité restreint un peu le plaisir de la visite. C'est une petite expo, gratuite, où on a l'impression que l'installation n'a pas été préparée avec ambition. On sent plus un leitmotiv pour faire connaître une artiste suédoise et inciter au passage à l'institut pour s'asseoir dans la très agréable cour pavée de l'Hôtel de Marle et déguster, au café suédois, une pâtisserie au sirop de fleurs de sureau fabriqué à partir de fleurs fraîchement cueillies. Le centre culturel suédois est un lieu de vie plus qu'un vrai musée, où flâner sera un plaisir. Néanmoins, il ne faut pas s'attendre à une expo de grande envergure. A noter que je ne vois toujours aucun rapport entre le titre de l'expo et son contenu !

Mention particulière pour l'artiste Karin Cyren et sa bande-dessinée « Maraton » (Cf. ci-dessous) qui présente la course poursuite, sur 42 km, dans des paysages variants en permanence (de la jungle à la savane, en passant par la lune et les dunes de sable), des personnages caricaturaux et rigolos.

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 20 octobre 2013 / Centre culturel Suédois – 11, rue Payenne, 75003 Paris / Ouvert du mardi au dimanche de 11h à 18h / Entrée gratuite

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Désirs et Volupté - MUSÉE JACQUEMART-ANDRE ☆☆☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente une sélection de toiles produites par des peintres célèbres de l'Angleterre de la Reine Victoria (XIXème siècle). Ces tableaux ont en commun une quête de l'esthétisme. Le sujet principal est la femme. Les thèmes sont tirés des mythes de l'antiquité. Les techniques picturales sont académiques. Les œuvres présentées appartiennent toutes à un collectionneur privé, Pérez Simon.

MON AVIS : Très belle expo ! Une exposition au Musée Jacquemart-André part toujours avec un avantage de taille. En effet, l'intérieur de cette ancienne demeure particulière de grand bourgeois, située bld Haussmann, est sublime. Ainsi, exposer des peintures qui prônent le culte de la beauté dans un lieu aussi magnifique a tout son son sens.

Un petit film diffusé sur grand écran à l'entrée de l'exposition pose avec précision et pédagogie le contexte de création de ces œuvres et attise notre curiosité. On découvre que pendant que le pays s'industrialise sous le règne de la Reine Victoria (1837-1901), les grands bourgeois qui s'enrichissent, certainement las de la panoplie visuelle de l'industrialisation (charbon, machine, bruit, saleté, monde d'homme...), commandent massivement des tableaux qui évoquent la beauté, la nature, la pureté et la femme. Paradoxal mais tout à fait compréhensible : alors que le monde s'enlaidit, les gens qui en ont les moins tentent de s'échapper à travers les peintures de toute beauté que leur confectionnent les peintres de l'époque.

La découverte de ces tableaux vaut en effet vraiment le détour. Nos yeux se posent avec délectation sur les détails de chaque peinture. Toutefois, le succès de l'exposition génère un trop plein de monde qui perturbe une visite sereine. De plus, une connaissance des mythes de l'antiquité, qui hélas ne m'habite pas encore, est incontestablement un plus, si ce n'est une nécessité, pour vraiment se laisser aller à une contemplation éclairée. L'absence de connaissance des mythes grecques ou romains laissent toujours un goût de frustration face à une toile nommée, par exemple, les «Les roses d'Heliogabale» peint en 1988 par Lawrence Alma-Tadema (Cf. ci-dessus). Cette dernière prend une envergure toute particulière quand on sait que Héliogabale, représenté en haut à gauche, affalé sur son banc, regarde avec jouissance perverse ses courtisans en train d'agoniser à ses pieds sous une pluie de rose dont il est lui-même le responsable. Cette œuvre montre que la beauté, derrière son attraction primaire, peut aussi être nuisible et méchante. Comment ne pas s'émouvoir et s'indigner (paradoxe de nouveau) face un génocide si esthétique ?

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 20 janvier 2014 / Musée Jacquemart-André – 158, boulevard Haussmann, 75008 Paris / Ouvert tous les jours de 10h à 18h avec nocturne jusqu'à 20h30 les lundis et samedis / Droit d'entrée : 11 euros, tarif réduit : 9,5 euros.
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TROIS EXPOS INOUBLIABLES ! ☆☆☆☆☆

PRÉSENTATION & AVIS : L'exposition présente une grande rétrospective de plus de 250 œuvres de l'artiste américain Keith Haring (1958-1990). On découvre avec plaisir son dessin si particulier (traits enfantins, couleurs vives, symboles répétitifs), sa manière de travailler (dessin rapide et incessant, en écoutant de la musique, sur tous type de supports) et son ambition artistique (utiliser l'espace public et un dessin simple pour s'adresser au plus grand nombre). Le thème de l'exposition est avant tout consacré à la démarche politique de sa création. On en apprend plus sur son activité militante pour la justice sociale et la liberté individuelle. Keith Haring s'est illustré dans la lutte contre le racisme, l'homophobie ou encore la destruction de l'environnement. Victime de l'épidémie de Sida, il a créé une fondation caritative au profit de la lutte contre la maladie. Icône de la deuxième vague du Pop art américain, dont l'explosion a lieu dans les années 80, et soutenu par Andy Warhol, considéré comme son mentor, Keith Haring reste aussi un personnage subversif. L'exposition présente une quantité d’œuvres incroyable dans un espace aéré et plaisant. C'est un ravissement visuel dans lequel on découvre un peu plus l'univers de cette grande star de l'art.


PRÉSENTATION & AVIS : L'exposition présente une grande rétrospective de plus de 130 peintures de l'artiste franco-hongrois Simon Hantaï (1922-2008). On découvre dans un parcours chronologique rigoureux et exhaustif toute l'évolution de sa démarche artistique. Les salles, larges et aérées, permettent une contemplation parfaite de chaque toile. A ses débuts, Simon Hantaï façonne une production surréaliste. Je retiens ses tableaux incorporant des sculptures de corps étrangers (comme des squelettes de têtes d'oiseaux) fixées à la toile. Ceci donne l'impression que le dessin s'échappe du cadre. Ensuite, peu à peu, il développe une esthétique propre et surtout, une technique de création inédite basée sur le pliage. Cela donne de grand tableaux, que je qualifierai de cellulaires et fœtusien, qu'il produit par série (Les Tabulas, les Meuns, les Mariales....). Superbe !
 

PRÉSENTATION & AVIS : L'exposition présente une rétrospective de plus d'une centaine de peintures de l'artiste franco-biélorusse Marc Chagall (1887-1985). On découvre, dans un parcours chronologique, son univers allégorique et onirique. La salle d'explosion, plongée dans l'obscurité, renforce, en adéquation avec l’œuvre de l'artiste, la sensation lunaire de la visite. Marc Chagall nourrit son dessin, figuratif et singulier, de thèmes récurrents inspirés par son histoire personnelle et le contexte historique (sa ville natale, la bible, la tradition juive....). Une mention spéciale pour le thème du couple, qu'il aborde avec poésie et sensibilité, et le tableau « paysage bleu ». Un travail très émouvant. Pour conclure, je reprends la formule du Musée du Luxembourg : « un univers pictural profondément singulier, reflet autant du monde contemporain que des propres émotions de l'artiste »....

Les Parisiens - HÔTEL DE VILLE ☆☆☆☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente, sur les murs de l'hôtel de ville de Paris et dans un livre collector aux éditions du Chêne (maison d’édition spécialisée dans le Livre illustré), 48 dessins de l'artiste japonaise Kanako Kuno, installée à Paris depuis 2005. Cette dernière collabore en tant qu'illustratrice depuis 2008 avec la société My Little Paris (agence Média, e-commerce et webzine dédiée aux plans insolites de la capitale), partenaire privilégié de l’événement. Ces dessins croquent avec dérision les habitudes typiques des parisiens.

MON AVIS : Drôlissime ! Il est difficile de ne pas s'identifier à au moins un dessin de cette exposition qui dépeint avec justesse et humour les petites manies ou coutumes de tous les parisiens (le stressé, l'overbooké, le fêtard, l'amoureux, l'écolo, le bobo...). Et finalement, nous sommes tous un léger mélange de ces personnages. 

Les dessins sont d'une telle simplicité, qu'ils captent sans ambages l'essence même de la vie parisienne. Derrière cette représentation des comportements, se cache ainsi une analyse sensible, émouvante et réaliste des causes de la nostalgie et de la conscience de désarroi des parisiens. A paris, en effet, la vie nous assomme et la seule manière de ne pas se laisser gagner par la ville, c'est de rentrer dans le jeu, de s'amuser, de dépenser, de visiter, de s'engueuler. Et tout le monde en regardant ces dessins peu discerner le caractère fictionnel qui se cache derrière chacune de nos attitudes. 

Vivre à Paris, ce n'est pas des vacances, c'est souvent un passage obligé pour trouver un job, c'est une ville chère et sélective, donc cruelle et contraignante, où les transports et le monde épuisent. On partage tous ce sentiment de désillusion vis-à-vis de Paris, nous sommes tous gagnés par le même abattement quand il s'agit de recommencer une semaine à Paris. Alors à travers ces dessins, on a l'impression de se retourner sur notre vie et de se dire : « en fait, c'est pas si mal que ça Paris, on s'amuse, on vit avec nos amis et on est amoureux ». Comme quand on repense à notre passé, cette exposition garde les meilleurs souvenirs de la vie parisienne et nous donne le sourire pendant l'espace d'un moment. Un sourire sincère et mélancolique. Bravo !

Mention spéciale, pour le dessin ci-à côté. Représentatif de toute la mauvaise foi du parisien, dont je suis le premier à user, mais avant tout, métaphore terrible de la pression qu'exerce le temps dans la capitale où le moindre déplacement doit être timé dans des journées qui s'enchaînent à une vitesse folle. Sans commentaires !

INFOS PRATIQUES : L'exposition est terminée mais retrouvez les dessins sur internet via le lien suivant (c'est moins pratique et agréable, mais c'est déjà ça !) : http://www.lesparisiens.paris.fr/fr/toutes_les_affiches
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Bronzes de la Chine Impériale - MUSÉE CERNUSCHI ☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente un ensemble varié et inédit de bronzes chinois des collections du musée Cernuschi. Cette institution, musée des arts de l'Asie de la ville de Paris, porte le nom du financier et collectionneur franco-italien Henri Cernuschi (1821-1896) qui s'est bâtis une grande collection d’œuvres d'art d’Asie lors d'un séjour au Japon et en Chine de 1871 à 1873. Cette collection a ensuite été entreposée dans son hôtel particulier, à la bordure du parc Monceau, qu'il légua à sa mort à la ville de Paris qui en fera un musée deux ans plus tard, en 1998.

MON AVIS : Expo d'initié peu accessible. L'exposition évoque l'utilisation par les dynasties chinoises du Xème ou XIXème siècle du matériau bronze comme outil de création pour renforcer leur autorité impériale. Ceci a influencé tout l'art asiatique de cette période. On découvre une série de vases, sous vitrine pour la plupart, de taille relativement petite (pas plus de 50-75cm), avec des motifs sculptés et des dorures. Pas de véritable choc esthétique ou de fortes impressions dûes à des dimensions importantes, on est plus là face à des jouissances érudites du détail. Recherchés par les collectionneurs, étudiés par les restaurateurs et très exposés à la contrefaçon, on apprend aussi que la valeur de ces bronzes est de plus en plus cotée.

L'exposition a une vocation très historique. Elle s'adresse avant tout à un public de connaisseurs ou passionnés par cette époque. Malgré des efforts de contextualisation grâce à de longs textes introductifs, le thème et son traitement restent très pointus et donc peu accessibles.

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 19 janvier 2014 / Musée Cernuschi – 7, avenue Vélasquez, 75008 Paris / Ouvert tous les jours sauf lundi de 10h à 18h / Droit d'entrée : 6 euros, tarif réduit : 4,5 euros , demi-tarif : 3 euros.
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Absolument Excentrique - HOTEL DE VILLE ☆☆☆



PRÉSENTATION : L'exposition présente une sélection d’œuvres d'art brut et singulier de 163 artistes en situation de handicap mental ou psychique issus de structures sociales de la Ville de Paris. L'exposition est organisée en coopération avec le collectif événementiel «Art & handicap».

MON AVIS : Superbe ! J'ai découvert l'art brut et singulier il y a quelques mois en visitant la Halle Saint-Pierre, espace au pied de la butte Montmartre consacré à cette forme d'art inattendu et insolite. J'avais hâte de renouveler l'expérience. Je n'ai pas été déçu. Les œuvres d'art brutes et singulières sont produites par des artistes autodidactes, sans culture artistique prononcée, et qui revendiquent une certaine spontanéité dans leur démarche de création, en opposition à l'intellectualisme de l'art officiel. 



Cette représentation libre et instinctive confère aux œuvres un pouvoir émotionnel très fort. On sent dans chaque trait l'état naturel, donc sauvage, de l'être humain, l'artiste, qui s'exprime en toute liberté. Ces toiles ou sculptures sont donc porteuses de sentiments intimes primaires et intenses. L'aspect esthétique est très enfantin et coloré mais d'une authenticité remarquable.



On retrouve toutes ces caractéristiques dans les œuvres de l'exposition Absolument Excentrique. Au vue des superbes créations de ces personnes en handicap mental, on se dit que cette forme d'art est peut-être la plus humaine et démocratique. Comme le définissait Jean Dubuffet, concepteur de la notion d'art brut, c'est «l'art où se manifeste la seule fonction de l'invention ». Seul reproche, l'exposition est trop courte !

Mention particulière pour les toiles de Renaud Phillipot (Cf ci-dessus). Ces visages difformes qui communiquent en lévitation dans un univers coloré sont un motif récurrent de ses tableaux.

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 9 novembre 2013 / Salon d'accueil de l'hôtel de ville – 29 rue de Rivoli, 75004 Paris / Ouvert tous les jours sauf dimanche de 10h à 19h / Entrée libre
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Roy Lichtenstein - CENTRE POMPIDOU ☆☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente une rétrospective du travail de l'artiste américain Roy Lichtenstein (1923-1997) à travers une sélection de plus d'une centaine de tableaux, sculptures et estampes. Il est considéré comme une des figures emblématiques du pop art américain (aux côtés d'Andy Warhol), mouvement artistique qui a marqué l'histoire de l'art et dont la notoriété et l'influence explose dans les années 60. Ses œuvres sont esthétiquement très reconnaissables : ses compositions en acrylique, aux couleurs vives et cernés de traits noirs, ont l'allure des dessins de bande-dessinée. Plusieurs séries de ses travaux sont exposées. En plus de ses célèbres agrandissements d'extraits de comics et d'objets de grande consommation, on découvre des relectures d’œuvres de grands peintres (Picasso, Mondrian, Cézanne, Matisse), des travaux abstraits sur les formes géométriques, des représentations agrandies et simplifiées de coups de pinceau, ou encore des reproductions de corps nus féminins et de paysages d'estampes chinoises. La démarche de création de la plupart des œuvres est commentée par l'artiste lui-même à travers des panneaux muraux contenant des extraits d'entretiens.

MON AVIS : Bien mais pas top. Le plaisir de cette exposition est double. Dans un premier temps, il réside dans la découverte de la pluralité des formats et des séries de travaux réalisés par Roy Lichtenstein. En effet, son style, agréable et joyeux, s'est exprimé dans d'autres motifs que les agrandissements de comics et d'objets de grande consommation et surtout, dans d'autres formats que la peinture. Ainsi, on découvre avec surprise et délectation des sculptures cubistes à la sauce Lichtenstein, un travail plus intime dans lequel l'artiste se dévoile.

Dans un second temps, le plaisir réside dans l'idée qui sous-tend ce travail et qui l'inscrit dans l'histoire de l'art. Il est fascinant, bien que difficile à concevoir aujourd'hui, que lorsque les œuvres de Roy Lichtenstein surgissent dans les années 60, elles représentent une révolution artistique et esthétique majeure. En effet, la critique considère qu'elles désacralisent la notion d’œuvre d'art. Deux raisons expliquent cela. Tout d'abord, Roy Lichtenstein rend accessible à tout le monde ses créations en peignant des sujets peu nobles issus des codes et symboles de la culture populaire (c'est en quelque sorte une opposition à l'élitisme artistique). Ensuite, la technique picturale utilisée (acrylique) est un produit industriel plus qu'artistique. Ses créations sont donc utilisées aujourd'hui pour illustrer l'époque post seconde guerre mondiale, une époque fun et insouciante où l'être humain s’épanouit à travers la consommation et le divertissement en cohabitation amicale avec la publicité. Était-elle vraiment comme ça ? L'ironie qui émane de ses œuvres nous montre que la réalité était certainement plus complexe que ça.

Toutefois, malgré le plaisir visuel et théorique, l'exposition ne m'a pas rassasié. L'espace très serré du cheminement gêne la contemplation des œuvres. De plus, bien que les informations annexes retranscrivent bien l'évolution des recherches esthétiques et thématiques de Roy Lichtenstein, le nombre d’œuvres pour l'illustrer est limité. Les textes abondants semblent être là pour compenser le nombre insuffisant de pièces. Résultat, on a l'impression d'avoir beaucoup trop lu dans un lieu confiné et sur-bondé (succès de l'expo oblige). Le plaisir de la déambulation et de la rêverie est très contrarié.

INFOS PRATIQUES : Jusqu'au 4 novembre 2013 / Centre Pompidou – Place Georges Pompidou, 75004 Paris / Ouvert tous les jours sauf mardi de 11h à 23h / Droit d´entrée : 13 ou 11 euros. Tarif réduit : 10 ou 9 euros.
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Ron Mueck - FONDATION CARTIER ☆☆☆☆☆

PRÉSENTATION : L'exposition présente une dizaine de sculptures de l'artiste australien Ron Mueck (né en 1958). Ancien modélisateur de marionnettes pour le cinéma et la télévision puis concepteur de mannequins de vitrine pour la mode, il décide de transformer ses créations professionnelles en œuvres d'art vers la fin des années 90. Ses sculptures, moulées en silicone, représentent des corps humains, habillés ou dénudés, soit dans des actions de la vie de tous les jours, soit dans des situations improbables. Les sculptures reproduisent, avec hyperréalisme et minutie, tous les détails du corps humain en incorporant de légères disproportions dans la taille des membres ou des changements d'échelle par rapport aux dimensions réelles. En fin de parcours d'exposition, un film révèle le processus de création des œuvres.

MON AVIS : Génial ! Le bonheur de cette exposition réside dans le triple effet produit par les œuvres de Ron Mueck. Dans un premier temps, les sculptures impressionnent par leur ultra-réalisme. Les veines translucides traversant les membres, les rides naissantes creusant les parois de la peau, les implantations de poils émergeant des pores des narines, les regards fixes scrutant l'horizon.... tous ces détails sont saisissants !

Dans un second temps, les sculptures troublent par l'atmosphère qu'elles dégagent. En effet, tous les personnages évoquent, à travers leurs postures (recroquevillés sur eux même ou étendus avec nonchalance), leurs physiques (corps vieillissants, squelettiques, palots, flétris ou obèses) ou leurs regards (absorbés dans le vague), un certain malaise. Sans renoncer à avancer, ils semblent toutefois condamnés à un fataliste silence face au poids des choses qu'ils supportent.

Dans un troisième temps, les sculptures déstabilisent par leurs dimensions anormales. C'est pour moi le véritable coup de maître de l'artiste. Cela génère une cohabitation invraisemblable, et génératrice d'émotion, entre représentations ultra-réalistes et inconcevables proportions. Ce mix entre apparence et format chamboule toutes nos impressions et installe une distance entre le spectateur et l’œuvre. On croit reconnaître un de nos semblables mais on ne peut pas s'identifier à lui. C'est un corps étranger perceptible mais intouchable.

Mention particulière pour la sculpture démesurément grande d'un couple de personnes âgées installé sous un parasol (Cf. image ci-dessus). C'est pour moi l’œuvre emblématique de cette exposition. La main de l'homme agrippé au bras de sa femme et le regard insondable de cette dernière, ce geste et cette réaction, produisent une émotion d'une très grande force.

INFOS PRATIQUES : Exposition jusqu'au 27 octobre 2013 / Fondation Cartier pour l'art contemporain - 261, boulevard Raspail, 75014 Paris / Ouvert du mardi au dimanche de 11h à 21h et nocturne le mardi jusqu’à 22h / Droit d´entrée : 10,50 euros et tarif réduit : 7 euros.
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